Que vont changer le DMA et le DSA pour les marketplaces ?

Le Parlement et le Conseil européen ont signé un accord le 22 mars et le 23 avril dernier visant à mieux encadrer les plateformes. Quel est l’impact pour les marketplaces et les vendeurs ? 

Les deux accords ont des buts différents, et globalement visent surtout à mieux encadrer les plateformes de réseaux sociaux et de contenu numérique (tablettes, téléphones). Mais on y retrouve certaines dispositions qui seront applicables aux marketplaces et qui peuvent être très intéressantes pour notre univers. 

DMA – Digital Market Act. 

En ce qui concerne les marketplaces, le DMA vise essentiellement Amazon.

Le DMA définit les acteurs concernés comme les très grandes plateformes (chiffre d’affaires, capitalisation boursière). On comprend facilement que pour les marketplaces, seuls Amazon et Alibaba seront vraisemblablement concernés.

Les autres marketplaces ne remplissent pas les critères et ne seront pas considérés comme « contrôleurs d’accès » selon les règles énoncées (chiffre d’affaires, capitalisation boursière, trafic). 

Au milieu de toutes les règles relatives aux plateformes de contenu, on retrouve deux règles qui, si elles sont appliquées, seront des bonnes nouvelles pour les vendeurs. Les « contrôleurs d’accès » auront deux nouvelles obligations : 

  • devront permettre aux vendeurs d’accéder aux données générées par leurs activités sur leur plateforme. 
  • devront autoriser les vendeurs à conclure des contrats hors plateformes.

Deux bonnes nouvelles pour les vendeurs

Que veut dire « accéder aux données générées par leur activité » ? Actuellement, les marketplaces fournissent les données de l’acheteur, leur adresse d’expédition, mais pas l’adresse e-mail, une donnée indispensable pour conduire une activité e-commerce. Même si elle n’est pas explicitement nommée, on comprend que « l’adresse e-mail » pourrait tomber sous le coup de cette nouvelle loi, et que ceci pourrait donc changer beaucoup de choses pour les vendeurs à l’avenir, si les marketplaces (=Amazon) est désormais contraint de fournir cette donnée aux vendeurs.

« Autoriser les vendeurs à conclure des contrats hors plateformes » : autre bonne nouvelle. Actuellement, les vendeurs ont l’interdiction d’insérer des asiles colis, ou d’écrire aux acheteurs en dehors du cadre de la transaction. Ceci pourrait bien changer. 

D’autres dispositions de la DMA interdisent aux « contrôleurs d’accès » de donner un traitement plus favorable à ses produits plutôt que ceux des vendeurs. Pas certain que ceci change grand-chose dans le cas d’Amazon, pour qui les résultats de recherche sont basés essentiellement sur la popularité des articles. Ce n’est pas le cas sur d’autres sites qui privilégient ostensiblement leurs propres produits, mais ces derniers ne seront pas considérés comme « contrôleurs d’accès », donc a priori pas concernés. Encore faudra-t-il prouver dans le cadre d’Amazon.

Bonnes nouvelles pour les concurrents d’Amazon : le « contrôleur d’accès » ne pourra plus recibler les acheteurs en dehors de sa plateforme sans leur consentement. Une arme marketing en moins, qui sera favorable aux autres sites, qui pourront toujours l’utiliser, si tant est que la législation sur les cookies tiers le permet. 

DSA – Digital Services Act

Le DSA concerne essentiellement les contenus litigieux, la désinformation et les produits contrefaits. 

Contrairement au DMA, la DSA concerne toutes les plateformes, petites et grandes, avec des obligations plus prononcées pour les grandes plateformes (+ de 45M de visiteurs/mois).

La DSA sera en particulier intéressante pour les fabricants qui visent à éradiquer la contrefaçon sur les marketplaces et à protéger leurs marques

Plusieurs dispositions seront renforcées / mises en place : 

  • Obligation renforcée pour les marketplaces de mettre en place des mesures de KYC, et déployer des efforts pour contrôles aléatoires de produits, ou adopter des nouvelles techno de traçabilité de produits. Exemple Amazon a commencé à le faire avec « transparency »
  • Possibilité de dénonciation de contenu illicite via notamment un réseau de « signaleurs de confiance », que les plateformes seront contraintes de mettre en place.
  • Obligation d’informer le vendeur si supprime un produit jugé comme contrefait, afin de lui laisser la possibilité de contester.

Ces obligations sont déjà plus ou moins mises en place par les plateformes. Néanmoins, on peut condamner une certaine opacité des règles et certains abus. Des produits sont supprimés des plateformes sous prétexte de contrefaçon alors que ça n’en est pas, et réciproquement. Une législation en la matière sera donc la bienvenue. 

Ces deux nouveaux textes seront mis en place entre la fin d’année et 2023, dès lors qu’ils entrent en vigueur, une fois formellement adoptés. 

Les contraintes pour les plateformes seront exemplaires et fortement dissuasives: des amendes d’un montant de 10% du chiffre d’affaires annuel mondial pour la DMA et 6% pour la DSA. On peut donc s’attendre à ce que ces mesures soient prises au sérieux par les marketplaces. 

Ces mesures visant à protéger les vendeurs nous semblent aller dans le bon sens, même si ces deux textes sont principalement orientés vers les réseaux sociaux et les plateformes mobiles, et moins vers les marketplaces. 

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